Les Helvètes

carte helvetie sous rome
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L’ère des migrations n’est pas achevée – les races aryenne, celte, teutone, etc – Destruction des lacustres – Installation des Helvètes, gouvernement, caractère, mœurs, habitations, costumes – Amour du brillant, bijoux, armes ornées – Pas de confort, nourriture grossière, banquets – Croyance religieuse : les Druides, coutumes, plantes sacrés: sélage, verveine, gui de chêne – Sacrifices humains, Druidesses – Culture intellectuelle, écriture, art – Fin de la Période préhistorique.


L’ère des migrations quasi-fabuleuses et des gigantesques exodes n’était point achevée. Les invasions aryennes se poursuivaient, l’Orient peuplait l’Occident ; Celtes, Scandinaves, Teutons, se fixaient à jamais sur le sol de l’Europe, succédant aux lacustres primitifs et timorés, aux troglodytes sauvages, aux tribus errantes.
C’est au cours du 2e siècle avant J.-C., que les Helvètes arrivèrent en hordes tumultueuses et conquérantes sur les bords du Léman, après s’être répandu en Suisse occidentale Ce sont des Celtes ou Gaulois, de taille assez élevée, au teint clair et aux cheveux blonds roux. Des incendies détruisirent alors probablement les cités lacustres dont les restes ont gardé maintes traces de feu. Les peuples vaincus, assujettis, rendus esclaves, abandonnèrent peu à peu leurs habitudes.
Plus forts, mieux armés, aguerris par les belliqueuses entreprises et les longs voyages, l’envahisseur transforma rapidement à son avantage la population conquise.
Les Helvètes – divisés en quatre tribus comptant trois cent mille hommes au temps de César, avait pour voisins le long du Jura, les Rauraques et les Séquanais : sur la rive gaude du Léman et dans la vallée du Rhône, les Allobroges, les Nantuates, les Véragres et les Sédunois ; dans la vallée du Tessin, les Lépontins, dans la vallée du Rhin postérieur les pays de St-Gall et d’Appenzel, le long du lac de Wallenstadt, le massif du Gothard et jusque dans l’Oberland les Rhétiens. La constitution politique des Helvètes était républicaine, fédérative, sans être pour cela très démocratique. La noblesse y exerçait une grande puissance ; les assemblées populaires avaient lieu chaque année à Avenches.
Mettant le culte de la force et du courage brutal, audacieux, féroce, bien au-dessus de l’ingéniosité et de la finesse, capables peut-être de comprendre la civilisation naissance, mais craignant de s’amollir par le luxe et les jouissances raffinées, nos ancêtres – car ceux-ci sont réellement nos ancêtres de race – se refusèrent longtemps aux douceurs de la vie. Quoi qu’ils eussent élevé en Helvétie mille deux cents villes et quatre cents villages, il n’étaient point hommes de repos, et, grands chasseurs, grand batailleurs, ils abandonnaient aux esclaves et aux femmes, le soin des terres et des bêtes, pour courir les forêts à la poursuite des cerfs et des sangliers.

Les habitations étaient des huttes de forme circulaire, quelques-unes construites de pierres brutes cimentées de terre argileuse, d’autres bâties avec des poteaux et des claies, avec des cloisons en terre, au-dedans et au-dehors. Le toit, large et solide, était composé de fortes douves taillées en forme de tuiles, de chaume ou de paille hachée et pétrie dans l’argile. Il n’y avait pas de fenêtres, ni de cheminée, la fumée s’échappait par une ouverture pratiquée dans le toit. Parfois encore, mais rarement, l’Helvète construisait une maison souterraine pour lutter contre les intempéries des saisons froides, et, dans lesquelles souvent, ils cachaient leurs récoltes.
Simplement vêtus d’un large pantalon et d’une sorte de veste sans manches, sur laquelle, en hiver, quelque peau de bête était jetée. S’ils ne se souciaient peu du repos et des meubles confortables – par exemple aucun lit ne se trouvait dans la hutte, d’armoires, de chaises, de coffres, nul trace – ils se plaisaient à se couvrir de bijoux, de diadèmes, de colliers, de bracelets, de ceintures, d’anneaux aux jambes ; l’or et le bronze étaient surtout utilisés pour ces objets de luxe dans les deux sexes étaient envieux. Naturellement, les armes, cette parure des peuples guerriers, profitaient aussi de ce goût pour l’ornement artistique et, quoique leurs formes n’aient rien de particulièrement distingué, elles ne se laissaient pas d’être chargées de gravures, de disques et d’ornements symboliques. Les armes offensives consistaient surtout dans la hache, la lance, l’arc et la fronde ; l’épée était réservée aux chefs.

Guerrier helvète
Guerrier helvète

D’ailleurs, cet amour du brillant constituait l’unique concession faite par l’Helvète aux choses d’agrément. Leur nourriture était grossière. Ils la voulaient surtout abondante et la dévoraient bestialement, tenant entre leurs mains – comme les sauvages contemporains – les morceaux de venaison à peine roussie par le feu. Parfois, ils se réunissaient en d’homériques banquets, pendant lesquels une quantité effrayante de victuailles et de liquide était absorbée. Les convives s’asseyaient sur des bottes de foin et de paille autour d’une table basse et grossière. Quand le service est prêt, dit Amédée Thierry, chacun fait son choix de quelques membres entier d’animal, le saisit des deux mains et mange en mordant…. On dirait un repas de lions… On boit à la ronde dans un seul vase de terre et de métal que les serviteurs font circuler ; on boit peu à la fois, mais en y revenant fréquemment ( Amédée Thierry d’après Posidonuis ). Les tables étaient d’habitude placées près des brasiers où cuisaient les viandes.
Ces repas se terminaient souvent par de sanglantes querelles où les coups mortels ne se comptaient pas et n’avaient, aux yeux des Helvètes, d’autre importance de montrer la bravoure et l’adresse du vainqueur.
Les croyances religieuses de nos ancêtres n’étaient d’ailleurs point faites pour adoucir leurs mœurs et les coutumes druidiques ne répugnaient pas à l’effusion de sang. Quelle était la théologie de ces cultes mystérieux dont les cérémonies s’accomplissaient dans le grand silence et l’impressionnante pénombre des forêts ? Nul ne le pourrait dire avec certitude. Les anciens, Luquin, César, Pline, Strabon, en ont parlé à différentes reprises, et c’est d’après leur dire que nous pouvons reconstituer par à peu près cette religion cruelle dont les Druides ne permettaient pas d’écrire des dogmes.


Les prêtes avaient sous eux des ministres subalternes : les Eubages, devins et sacrificateurs, et les Bardes qui chantaient des hymnes divins et les exploits des héros. Les Druides, philosophes, astronomes, médecins et interprètes des lois, étaient dépositaires de la doctrine et les oracles des dieux ; étrangers à la guerre, ils ne payaient aucun tribut ; revêtus dans l’origine du pouvoir suprême.
Des collèges, sorte de séminaires, avaient été créés sur divers points de la Gaule et de la Germanie. L’éducation des initiés ne durait pas moins de vingt ans, pendant lesquels on leur faisait apprendre un nombre prodigieux de vers obscurs qui contenaient la doctrine. Les Druides présidaient aux états, disposaient de la guerre et de la paix, et déposaient les magistrats, et même les grands chefs, s’ils venaient à violer les lois du pays. La justice ne se rendait que par leur ministère ; et ceux qui refusaient d’obéir à leurs décisions étaient frappés d’anathème. Ils s’adonnaient à la magie et attachaient des vertus mystérieuses à certaines plantes. La sélage s’arrachait de la main gauche, la vérocine, propre à guérir toutes les maladies, se cueillait avant le lever du soleil, le premier jour de la canicule, après avoir offert à la terre un sacrifice d’expiation. La cueillette du gui de chêne constituait un des actes les plus solennels du culte druidique. C’était au mois de décembre, au sixième jour de la lune, que le prêtre, vêtu de blanc, montait sur l’arbre et coupait la plante parasite avec une faucille en or. Après quoi, deux taureaux blancs étaient immolés.
Les sacrifices ne se bornaient pas, hélas ! à l’égorgement des bêtes de somme. En plusieurs lieux de notre pays, on a trouvé des autels de pierre, dont la destination n’est point douteuse. Les victimes humaines, esclaves, prisonniers de guerre, enfants, Helvètes adultes même, furent souvent offertes en expiation sur ces blocs étranges. Ces hommes croyaient qu’on ne peut obtenir des dieux la vie d’un être humain qu’en sacrifiant un autre homme à sa place. De là, le nombre probablement fort grand de meurtres religieux.

Initiation druidique
Initiation druidique

On peut se représenter les Druides, couronnés de feuilles de chêne, portant un collier en or, vêtus d’une longue robe blanche et marchant les pieds nus. Leurs femmes partageaient la considération qu’on avait pour leurs maris et habitaient des sanctuaires interdits aux hommes. Plus d’un empereur romain vint les consulter. D’autres Druidesses vivaient dans le célibat, c’étaient les Vestales des Gaules ; elles portaient des vêtements blancs avec une ceinture en bronze et tiraient entre-autres, leurs présages du tournoiement et du murmure de l’eau, coutume apprise peut-être des lacustres ? Le druidisme, souvent persécuté par les Romains, ne disparut pas d’une manière générale vers le sixième siècle de notre ère.
Au point de vue intellectuel, scientifique, si ce mot peut s’appliquer à cette époque toute d’ignorance et de naïveté brutale, il est certain que les Helvètes connaissaient et pratiquaient l’écriture, tout au moins en caractères grecs. César rapporte dans sa Guerre des Gaules qu’après la bataille de Bibracte – dont nous parlerons prochainement – on trouva dans le camp des Helvètes vaincus, des tablettes écrites en lettres grecques qui indiquaient le nombre des hommes en était de combattre, ainsi que celui des vieillards, des femmes et des enfants. Van Muyden croit que les Helvètes furent initiés à l’alphabet hellénique par les Massiliotes. Il y a encore à noter ce fait curieux que les monnaies gauloises sont imitées des pièces macédoniennes de Philippe et Alexandre. Divers historiens admettent que la civilisation grecque a pénétré chez nous par le nord, l’infiltration a suivi le Danube.
Les Helvètes, eurent-ils une poésie ? c’est probable. Nous savons que les Celtes avaient des bardes qui composaient des vers sur les actions glorieuses des héros et qui les chantaient en s’accompagnant sur la lire. Nous connaissons aussi les Scaldes de Scandinavie qui nous ont laissé des spécimens de la poésie septentrionale. Donc, quoi on n’aie rien retrouvé des poèmes helvétique, on peut admettre, étant donné l’origine de nos ancêtres et la similitude de cultes qu’ils présentent avec les peuples dont nous venons de parler, qu’eux aussi célébrèrent par des hymnes les grandes œuvres de leurs guerriers illustres.

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